Les experts, c’est nous

Lorsque j’ai accouché de mes enfants, il y a de cela 10-15 ans, il y avait au Québec un beau mouvement qui voulait que les femmes se réapproprient l’accouchement. L’acte médical de se « faire accoucher » redevenait l’acte naturel qu’est de donner naissance. Je crois qu’il est temps qu’un mouvement similaire se mette en branle pour se réapproprier notre rôle parental.

Si nous avons pu décider comment notre enfant naîtrait, aussitôt sorti du ventre nous en perdons le contrôle. Ça commence par le système de santé qui nous dicte quoi lui donner à boire, quand commencer à lui donner des solides, à quel âge s’inquiéter s’il ne dit pas ses premiers mots. Nous leur faisons évidemment confiance : ce sont eux les spécialistes. Qui sommes-nous, simples parents, pour juger du meilleur pour notre enfant ?

Puis vient la garderie. On nous dit combien d’heures par jour il devrait dormir, à quel âge il devrait être propre, quels sont les comportements sociaux normaux. Encore une fois, nous leur faisons confiance : ce sont eux les spécialistes. Qui sommes-nous, simples parents, pour juger du meilleur pour notre enfant ?

C’est le tour ensuite de l’école. On nous dit ce que devrait contenir sa boite à lunch, ce qu’il devrait savoir, quel degré de concentration il devrait démontrer. S’il sort des standards, on nous rencontre pour nous recommander à mots à peine voilés de consulter un médecin, même si tout semble normal à la maison. Mais on fait confiance à l’équipe-école : ce sont eux les spécialistes.

Qui sommes-nous, simples parents, pour juger du meilleur pour notre enfant ?

Ça semble beau, cet appui constant, mais, en fin de compte, à force de se faire répéter qu’on ne sait pas quoi faire avec notre progéniture, on finit soit par y croire, par baisser les bras de guerre lasse. On met alors notre instinct de côté et on délègue à tous ces spécialistes la tâche d’éduquer nos enfants, puisqu’ils savent si bien ce qu’il y a de mieux pour eux.

La réalité, c’est qu’être parents, si ce n’est pas toujours facile, c’est tout aussi naturel que d’accoucher. N’en déplaise aux spécialistes de ce monde, nous avons en nous, pour l’écrasante majorité, les outils qu’il nous faut pour éduquer nos enfants avec succès. Leurs conseils, il faut en prendre et en laisser et, surtout, cesser de croire que tous ces intervenants sont la solution à nos problèmes. NOUS sommes la solution pour faire de nos enfants des citoyens épanouis.

Parents, il est temps de nous réapproprier notre rôle parental. De dire « merci, mais non merci » à tous ceux qui veulent nous faire croire qu’ils en savent plus que nous sur nos enfants. Parce que s’ils sont chacun les spécialistes dans leur domaine, il n’y a que deux spécialistes de nos propres enfants ; c’est nous, leurs parents.